Alfred Dreyfus, un homme court dans la nuit

FICHE DU LIVRE : 
Octobre 2008
Auteur : Anne Monteil-Bauer
Titre : Alfred Dreyfus, 
un homme court dans la nuit
Couverture : Peinture de Dan Steffan
Conception Graphique : 
Mon Artiste est un Boucher
83 pages 11 € 
ISBN : 978-2-91748-605-4

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Le texte...


Une traversée poétique inspirée du journal tenu par Alfred Dreyfus durant les cinq années de sa déportation sur l’île du Diable en Guyane.

 

 « Car enfin, il n’y avait pas seulement le procès Dreyfus. L’erreur judiciaire avait un corps. Là-bas, à des milliers de kilomètres, un innocent torturé succombait sous une accumulation presque inouïe de souffrances. Il fallait délivrer ce malheureux en même temps que la vérité. La vérité aurait pu attendre, à la rigueur, pas l’homme  ».

                                                                                   Léon Blum

 

 C’est qu’Alfred Dreyfus n’est pas seulement gênant parce que spectaculairement incorrect, il l’est aussi parce qu’il refuse de se poser en victime de la haine antisémite, jamais il n’entrera dans le discours des antisémites, il se bornera inlassablement aux faits qui lui sont reprochés, on l’accuse de trahison, il n’a pas trahi, point. On aurait voulu qu’il pleure, il se tient droit et raisonne. C’est un être profondément rationnel, profondément laïque, ses valeurs sont celles de la justice et de la démocratie, c’est à elles qu’il s’accroche. La laïcité ne nous dit-elle pas que si nous avons des convictions religieuses, celles-ci sont du domaine du privé, de l’intime ? La démocratie ne se porte-t-elle pas garante d’une justice appliquée équitablement à tous ?



Extrait...


Monsieur le Président de la République,

Accusé, puis condamné sur une preuve d'écriture...


Monsieur le Président de la République,

Je ne viens solliciter ni grâces, ni faveurs, ni convictions morales ;

Je demande, je supplie qu'on fasse la lumière pleine, entière sur cette

machination.

Je vous demande justice !


Monsieur le Président de la République,

Je ne parle pas des souffrances physiques, elles ne sont rien ; les peines

du coeur sont tout.


Il est pris d'un vaste fou rire.

Comme dans les glaces des fêtes foraines, une image démultipliée de lui-même, des lettres tendues dans les main, s'échappe à l'infini sous son regard.

Tout son corps est chahuté par un hoquet nerveux, entre la fièvre et les larmes, il se lève, il plie la lettre, il sourit, fractions bleu ciel gagnées sur l'enfer, ses yeux sont brûlants, droits, perdus dans le

lointain ; il tend l'enveloppe à ses gardiens.


On a enfin prévenu ma famille que les lettres devaient passer par la voie du ministère!

Toujours rien, le coupable n'est pas découvert.

Mais je ne lâcherai pas pied !


Il pleut, les pluies torrentielles de Guyane que la chaleur dessèche mais qui pourtant transpercent.

                                     

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