Les saisons sur la colline de l’Hermitage
Les saisons sur la colline de l’Hermitage
Une approche photographique et poétique de la colline drômoise et de son vignoble par le photographe Yves Neyrolles
La nature et la culture, quand elles s’allient et se complètent, donnent naissance à des lieux qui tiennent du prodige, traversant les siècles et les mémoires, invitant le regard et l’esprit à s’arrêter, à s’ouvrir à quelque chose de plus que l’admiration, que la contemplation : la célébration.
La colline de l’Hermitage, avec ses vignes qui surplombent le Rhône, fait partie de ces paysages qu’une fois découverts on ne peut oublier.
Ce livre invite à une flânerie au fil des saisons, découvrant, aux pas lents du photographe, le rite de la vigne et de celles et ceux qui l’accompagnent tout au long de l’année, qui l’entretiennent, la cultivent, s’exercent, en gestes subtils patiemment repris de celles et ceux qui les ont précédés, à faire de ce don primordial de la nature le nectar prodigieux qui, irrésistiblement, enchantera les palais, suscitera le bonheur et la vie.
Extrait :
« Mai, juin, juillet. Après ce festival des couleurs, c’est à présent le vert, avec ses nuances et ses sous-nuances, qui domine, ancré définitivement dans le paysage. La colline est devenue cette vague immense, immobile mais frémissante, à travers laquelle, chaque jour, les soins des hommes et des femmes se multiplient, dans le seul souci d’assister la vigne, ces milliers de milliers de plants dressés de plus en plus fièrement, de plus en plus follement pourrait-on dire, sur les pentes, dans le seul but de veiller à ce que toutes les conditions soient constamment réunies pour l’organisation de vendanges fructueuses. Après la fleur, bref moment du développement des tiges nouvelles, les grappes se forment en grand nombre à la base de chaque pied, la vigne montrant, comme je l’ai déjà écrit, sa vigueur et sa générosité.
Hommes et femmes, répartis dans les rangées d’une verdure de plus en plus ample et envahissante, houle dans laquelle leurs silhouettes semblent plonger et se fondre, tempèrent cette surabondance, éliminant les rameaux secondaires par « épillonnage », selon l’expression de Patrick Janvier, du Domaine Guigal, ainsi que nombre de feuilles qui empêchent l’air et la lumière de pénétrer au mieux en chacun de ces « corps » dont la hauteur tend à les dépasser. Ils et elles reprennent et poursuivent le patient travail de relever les tiges conservées et de les lier de nouveau, plus haut, toujours plus haut, à l’échalas devenu quasi imperceptible dans l’immense étendue vivante.
Confirmant leur vigueur, les ceps ne cessent de dresser de nouveaux jets garnis de feuilles d’un vert plus tendre et qui, à contre-jour, paraissent presque jaunes, comme solaires : un coup de cisaille bien administré suffit à réduire la pointe de ce nouvel élan de la plante - décidément vivace. »